Visages d’une maladie

« Il faut accepter de l’aide »

Willy Imstepf explique : « Je ne dépendais de personne. » Il avait de l’énergie à revendre et se sentait libre. Pendant 45 ans, le Haut-Valaisan a pratiqué l’alpinisme, gravissant d’innombrables fois le Cervin, franchissant la face nord de l’Eiger et parvenant à la fin même à venir à bout de sommets culminant à plus de 8000 mètres. À chaque fois, il pouvait compter sur sa propre force. Arborant un sourire amusé, il raconte qu’il n’a jamais été un grand grimpeur mais visiblement un solide marcheur, faisant un pas après l’autre et avançant mètre après mètre jusqu’à ce qu’il atteigne les plus hautes cimes du monde.

Aujourd’hui, Willy Imstepf a besoin d’aide pour s’habiller et se raser. Il remarque que quelque chose cloche lorsqu’il veut montrer le Kilimandjaro à sa femme. Pour la première fois de sa vie, il a de la peine à la montée. Rentré chez lui, il consulte un spécialiste pour se faire examiner et apprend qu’il est atteint de la SLA, une maladie incurable affectant le système nerveux central et périphérique. Dans la vidéo, il parle de sa vie et de son quotidien rythmé par la maladie. Et admet qu’il est obligé de se laisser aider. « Il faut l’accepter », dit-il. Il reste maître de lui-même, fidèle à la force qui l’a toujours accompagné, malgrè tout. Le clip de Willy Imstepf, à regarder, marquer d’un like, partager et commenter dès maintenant.

Vidéo Willy Imstepf ( 8 min. )

Serrer les dents, après tout

À découvrir dès maintenant : la vidéo retraçant la vie de Willy Imstepf, passionné d’alpinisme, qui a été diagnostiqué de la SLA le printemps dernier « Son expérience lui a été bénéfique », constate Willy Imstepf, car il a toujours dû s’aider lui-même dans la vie. Et il en est toujours ainsi à présent, poursuit-il. Maintenant qu’il sait qu’il est atteint de la SLA (sclérose latérale amyotrophique), une maladie neurodégénérative incurable. Il doit vivre avec jusqu’à la fin de ses jours, dit-il. Arborant un sourire amusé, ce Haut-Valaisan souligne qu’il n’a jamais été un alpiniste hors norme : « Mais j’ai toujours été bon marcheur, quel que soit le terrain. » Pendant près de 45 ans, il exerce l’activité de guide de montagne. « À pleins tubes », précise-t-il, et Willy Imstepf dispose d’une énergie intarissable. Dans sa carrière de guide de montagne, les sommets qu’il gravit se succèdent, de même que les moments marquants. Des montées particulièrement difficiles et dangereuses, telles que celles vers les Grandes Jorasses, le Mont Blanc et l’Eiger par la face nord. C’est peut-être justement cette expérience qui lui fait résumer en quelques mots sa vie actuelle avec la SLA : « Se battre pour tenir. Un point c’est tout. ».

> Vidéo Willy Imstepf ( 8 min. )

Accepter de l’aide
À chaque fois, Willy Imstepf atteint la cime. Mais l’année passée, il doit pour la première fois de sa vie lutter quand il veut montrer le Kilimandjaro à sa femme Christine. Pressentant alors un problème de santé, il consulte un spécialiste pour se faire examiner. Et c’est là qu’il est diagnostiqué de la SLA. Willy Imstepf, lui pour qui durant des décennies, aucune montagne m’était trop haute, aucune pente trop escarpée, aucun versant trop dangereux, dépend aujourd’hui de l’aide d’autrui ; sa femme l’assiste pour se raser, s’habiller et manger – ses mains ne suivent plus. Il faut savoir l’accepter, ajoute-t-il : « Sans quoi tu commences à tourner en rond.»

Une belle vie
S’il luttait auparavant pour chaque mètre de corde, il se bat aujourd’hui pour chaque lettre dans son journal intime. Il y consigne l’évolution de sa maladie, son état et son humeur actuels et les changements qu’il remarque chez lui. Si son sort le peine et le fait naturellement souffrir, il peut constater, en jetant un regard en arrière, « avoir eu une belle vie et vécu toutes sortes d’aventures. Il se rappelle avoir un jour gravi le Gasherbrum II, un sommet culminant à plus de 8000 mètres à la frontière entre la Chine et le Pakistan, avec son compagnon de cordée Kilian Volken. Ils s’étaient préparés pendant trois ans. Valaisan comme lui, Volken sera plus tard le seul survivant d’une avalanche parmi neuf alpinistes, celle-ci faisant deux victimes parmi ses hôtes. Dans l’émission SRF-DOK diffusée sur la première chaîne alémanique, cette tragédie de la montagne était décrite par des propos tels que « L’être humain est indifférent aux montagnes » et « Le destin ne connaît pas de logique et ne rend pas de comptes ». Il s’agit peut-être d’affirmations qui permettent de comprendre comment Willy Imstepf réussit à puiser la force accumulée dans sa vie à escalader des pentes raides et à gravir des sommets. Il peut également s’inspirer de cette expérience pour concevoir la vie et la mort, ayant été d’innombrables fois « sous le ciel à portée de main ».

Un nouveau chapitre du livre de la vie
En tenant depuis peu le restaurant d’alpage « Rarnerchumma », Willy et Christine Imstepf ont ouvert un nouveau chapitre de leur vie. Situé directement le long du sentier de haute montagne de la rampe sud du Lötschberg dans le canton du Valais, à 1006 mètres d’altitude, cet établissement concrétise un désir nourri depuis des années : offrir aux randonneuses et randonneurs un espace de ressourcement et de détente loin du quotidien trépidant. « Du livre de ta vie, tu ne peux enlever des pages mais tout de même à chaque fois y ouvrir un nouveau chapitre », concluent-ils sur leur site rarnerchumma.ch

Deux frères unis par la même profession de guide de montagne
Willy Imstepf et son frère Christian, cadet de 14 ans, avaient fait de leur passion commune une profession en ayant proposé ou proposant toujours des randonnées dans les Alpes en qualité de guides. Pour l’un et l’autre, la priorité absolue est la sécurité et le bien-être de leurs client·e·s, écrivent-ils sur leur site web : « Afin que vous puissiez rentrer chez vous, riches de l’expérience d’un sommet gravi avec succès et en emportant de magnifiques souvenirs. » Après le diagnostic de SLA auquel Willy Imstepf a été confronté, le duo a maintenant lui-même valeur de souvenir. 2bergfuehrer.com

Willy Imstepf (1955) – guide de montagne diplômé UIAGM, moniteur de ski, ski-alpinisme (Patrouille des Glaciers), guide de canyoning, grande expérience des escalades en haute montagne, p. ex. vers le Gasherbrum II (8034 m), qui fait partie de la chaîne de montagnes du Karakorum dans la région frontalière entre la Chine et le Pakistan

Christian Imstepf (1969) – guide de montagne diplômé UIAGM, guide de canyoning, ski-alpinisme (Patrouille des Glaciers), trekking à l’étranger, ski de fond

> Vidéo Willy Imstepf ( 8 min. )

En souvenir de Konrad Hort

Ne pouvant plus exercer son métier, il était contraint de cesser son commerce de boucher-charcutier après trente ans, annonçait-il sur Facebook en février 2024. Quelques mois plus tôt, à l’âge de 62 ans, Konrad Hort avait été diagnostiqué de la sclérose latérale amyotrophique (SLA).

La maladie neurodégénérative incurable progresse rapidement chez lui, le privant finalement de l’énergie nécessaire pour poursuivre son activité professionnelle. Peu de temps après, Konrad Hort ne peut plus marcher qu’à l’aide de cannes anglaises et six mois plus tard, se déplaçant désormais en fauteuil roulant, il doit emménager d’abord dans un appartement accessible aux personnes à mobilité réduite puis, pour la dernière période de sa vie, dans un EMS. Lorsqu’il nous contacte au début de l’année dernière, Konrad Hort s’engage immédiatement pour SLA Suisse. Avec la franchise qui le caractérisait et le souci d’encourager d’autres personnes atteintes de la même maladie que lui et de leur fournir quelques conseils pratiques. C’est ainsi que Konrad Hort nous a autorisés à nous servir de sa biographie pour lancer un appel à dons. En outre, il a participé à un épisode du podcast réalisé il y a quelques mois par SLA Suisse dans lequel il a partagé son savoir et son expérience en matière d’alimentation spécifique aux besoins des personnes touchées par la SLA, notamment en attirant l’attention des auditeur·trice·s sur le rôle essentiel des protéines pour maintenir la masse musculaire. Et de souligner l’importance cruciale d’une adaptation individualisée du mode d’alimentation pour la qualité de vie des personnes concernées. De même, Konrad Hort a pris part aux rencontres régulières que nous organisons dans sept localités du pays et en ligne. Il s’en est fait un véritable ambassadeur, partageant combien ces échanges lui apportaient des conseils précieux pour faciliter son quotidien.

Le 4 novembre, Konrad Hort est décédé à l’âge de 64 ans. Nos pensées accompagnent la famille en deuil à laquelle nous tenons par la présente à exprimer toute notre sympathie et notre profonde gratitude pour tout ce que le défunt nous a donné et apporté au cours des presque deux dernières années.

Konrad Hort, 4 mars 1961 au 4 novembre 2025

Une ode à la joie

Quatrième volet de l’histoire de Manuel Arn composée de cinq parties, qui traite de son amour de la musique. « Le chant a été pour moi d’une importance existentielle », explique Manuel Arn. Il a la petite quarantaine lorsqu’il est diagnostiqué d’une maladie incurable désignée par le sigle SLA. C’était il y a plus de dix ans. Aujourd’hui, il n’est plus en mesure de chanter car la maladie l’a privé de sa vigueur vocale et ne lui permet plus de faire vibrer sa voix de ténor. De percevoir ces vibrations lui importait beaucoup, se rappelle-t-il : « J’ai extrêmement souffert de cette perte », admet Manuel Arn.

La joie comme devise de vie Manuel Arn est néanmoins reconnaissant d’avoir découvert la sonorité de sa voix. Il pense souvent à qui il serait aujourd’hui s’il n’avait pas pratiqué le chant. Sa gratitude a résisté au passage des jours, tout comme son amour fidèle pour le chant.  C’est ainsi qu’il a assisté à une représentation de la Neuvième Symphonie de Ludwig van Beethoven au Centre Culture & Congrès KKL de Lucerne, notamment pour se délecter à l’écoute du dernier mouvement choral intitulé « Joie, belle étincelle des dieux ». Car la joie, précise Manuel Arn, est sa devise de vie : « En ressentant de la joie, je puise un grand sens de la vie », constate-t-il. Et chaque fois qu’il rencontre la joie, il souhaite exprimer une profonde reconnaissance.

Compositeur perdant l’ouïe Devenu pratiquement sourd, Beethoven ne pouvait plus entendre sa propre œuvre lorsqu’elle a été exécutée pour la première fois. Le compositeur a écrit à ses deux frères qu’il n’osait plus rencontrer des gens : « Si je m’approche d’une réunion de personnes, je suis envahi par une peur ardente de m’exposer au risque qu’on s’aperçoive de mon état. » Paradoxalement, « La Neuvième » célèbre le contraire, à savoir l’unité de tous les individus, devenant ainsi un symbole universel de la paix et de la liberté.

À la vue du public entier Beethoven a perdu sa capacité auditive, Manuel Arn, sa voix de ténor – les deux font l’expérience d’être privé d’une faculté naturelle au cours de leur vie. Cependant, 200 ans les séparent et alors que le premier s’est retiré de la société, le second parvient à prendre part à la vie sociale. Le monde et les mentalités ont bien évolué depuis ; si un handicap physique était considéré comme un vice à l’époque de Beethoven, l’auditeur d’un concert peut de nos jours faire partie de l’auditoire en fauteuil roulant. Et tandis que Beethoven se plaignait, « depuis si longtemps déjà, je ne suis plus réceptif à l’écho intense de la joie réelle », Manuel Arn prend un moment de répit sur son fauteuil roulant, manifestant la signification de l’« ode à la joie » à la vue du public entier.

« La Neuvième de Beethoven La Neuvième Symphonie en ré mineur, op. 125, exécutée pour la première fois en 1824, est la dernière achevée du compositeur Ludwig van Beethoven. Le 2 janvier 2025, l’orchestre symphonique de Milan interprétait l’œuvre au KKL à Lucerne.

SLA Suisse Créée en 2007, l’organisation soutient les personnes atteintes de sclérose latérale amyotrophique (SLA) et leurs proches en mettant à leur disposition une offre de prestations étendue au gré des besoins :

  • Remise en prêt de moyens auxiliaires
  • Consultation sociale, accompagnement psychologique et conseil sur la situation d’habitation
  • Aide directe lors de difficultés financières aiguës
  • Rencontres d’entraide et d’échange en présentiel et en ligne
  • Mise en réseau et formation de professionnel·le·s
  • Semaine de vacances annuelle et excursions d’un jour réservées aux personnes directement touchées et à leurs proches ou accompagnateurs·trices

Sclérose latérale amyotrophique (SLA) La maladie incurable qui affecte le système nerveux central et périphérique provoque dans les mois et années qui suivent le diagnostic des paralysies progressives de toutes les parties du corps, limitant généralement l’espérance de vie restante dans une mesure très importante et se répercutant dans de nombreux cas sur les capacités cognitives. En Suisse, environ 600 personnes sont atteintes de SLA, un chiffre qui avoisine les 400’000 à l’échelle mondiale. La maladie se déclare le plus souvent dans le midi de la vie, un peu plus souvent chez les hommes que chez les femmes.

En souvenir de Nicolas Gloor

Nicolas Gloor a 26 ans lorsqu’il est diagnostiqué de la maladie SLA. Nous avons fait sa connaissance durant nos rencontres d’entraide et d’échange et sommes allés le trouver chez lui pour en faire la couverture de notre rapport annuel 2023. Nous avons alors pu approcher un jeune homme d’une force et d’un calme intérieurs hors du commun. « Nicolas a toujours eu les deux pieds sur terre », nous confiait alors Elisa, sa meilleure amie.

Nicolas Gloor aimait les paroles limpides et tenait des propos tels que ceux-ci : « Ton individualité ne te sert à rien si tu ne la partages pas. » C’est un enseignement qu’il avait tiré de son séjour au Sénégal où il a découvert le sort des enfants de rue. De retour en Suisse, il a créé sous le nom Yakaar (lueur d’espoir en français) une fondation dont le but est de sensibiliser le public aux conditions de vie des plus démunis et vulnérables de la population de la capitale sénégalaise.

Ses amis lui rendaient visite chaque jour et sa famille était toujours là pour lui. Ils lui offraient leur temps, et lui leur prêtait toute son attention. C’était leur façon de vivre la solidarité – la valeur essentielle pour Nicolas Gloor. Après son diagnostic de SLA, Nicolas Gloor a décidé de ne plus ajourner les choses, s’apprêtant selon ses dires à vivre pleinement dans le présent. Après avoir d’abord continué à vivre dans son propre appartement à Renens (VD), il a emménagé dans un home médicalisé deux ans plus tard. Au dernier stade de sa maladie, il était presque entièrement paralysé, ne pouvant plus marcher et pratiquement plus parler et ne s’alimentant plus que par sonde gastrique. Le 13 octobre, 2025, Nicolas Gloor est décédé à l’âge de 29 ans.

Nous souhaitons à la famille en deuil et à tous ses amis de puiser du réconfort dans le souvenir d’une personne remarquable qui, bravant son sort, a pu garder sa force intérieure jusqu’à la fin. Nicolas Gloor nous a touchés par sa manière de concevoir la vie.

Nicolas Gloor, 7 juillet 1996 au 13 octobre 2025

Journée des proches aidants

Le 30 octobre coïncide chaque année avec la Journée des proches aidants. Pour montrer ce qu’impliquent l’aide et les soins à un membre de la famille, Manuela Visscher et sa mère atteinte de SLA nous font découvrir sous une forme émouvante quelques aspects de leur quotidien marqué par la sollicitude envers la personne aidée, l’épuisement dû à la charge de travail mais également par l’amour d’une fille dévouée à cette tâche auprès de sa maman malade.

> Vidéo

Heidi Müller est également proche aidant. Dans le podcast « SLA. Vivre dans le présent » réalisé en Suisse allemand, elle parle à cœur ouvert de son quotidien auprès de son mari atteint de SLA. Écoutez-le sans tarder – sur toutes les applications ou plates-formes dédiées, de même que sur notre site web.

> Podcast: „SLA »

100 grammes de protéines par jour

Boucher-charcutier exploitant depuis bientôt trente ans son propre commerce dans la commune bernoise de Köniz, Konrad Hort informe sur Facebook en février 2024 qu’il ne peut plus exercer son métier, ayant été diagnostiqué de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) quelques mois plus tôt.

Konrad Hort est contraint de cesser son commerce vu la progression rapide de cette maladie neurodégénérative incurable qui l’affaiblit de plus en plus. Peu de temps après, il ne peut plus marcher qu’à l’aide de béquilles et six mois plus tard il emménage dans un appartement accessible aux fauteuils roulants et aujourd’hui, il réside dans un EMS. À 64 ans, Konrad Hort se déplace en fauteuil roulant.

Depuis presque deux décennies, SLA Suisse soutient des personnes atteintes de SLA, par exemple en leur permettant de participer à des rencontres régulières dans sept localités du pays, de se réunir en ligne ou de profiter de ses nombreuses autres offres. Konrad Hort apprécie de pouvoir échanger avec d’autres personnes touchées : « Leurs récits sur leurs manières de gérer leur vie avec la maladie lui sont extrêmement utiles », dit-il. Et comme maître boucher-charcutier il connaît l’importance d’une alimentation adaptée pour les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire telle que la SLA : « Consommer 100 grammes de protéines par jour est ainsi essentiel pour maintenir la masse musculaire », explique-t-il.

D’une manière générale, l’alimentation est un élément-clé dans l’approche de la SLA. Son savoir et son expérience, Konrad Hort les partage dans un épisode du podcast réalisé par SLA Suisse consacré à ce thème que Theresa Seiser, logopédiste auprès de la clinique de réadaptation Zihlschlacht (TG). éclaire de son point de vue. Invités par Danielle Pfammatter qui anime ce premier podcast traitant de SLA jamais réalisé en Suisse, ils s’accordent les deux à souligner que la qualité de vie des personnes atteintes de SLA passe essentiellement par une adaptation individuelle du mode d’alimentation.

(Konrad Hort, 04.03.1961 – 04.11.2025)

Réalisé récemment : le podcast « SLA. Vivre dans le présent » (6 épisodes)

2e épisode : L’alimentation

Apprendre à prendre plaisir à la vie

Troisième volet de l’histoire d’une vie avec la SLA – aujourd’hui avec Valentin et Matthias Arn dont le père Manuel vit depuis plus de dix ans avec la maladie neuromusculaire incurable qu’est la sclérose latérale amyotrophique (SLA). Les deux jeunes hommes nous racontent quel regard  ils portent sur leur père aujourd’hui et ce qu’il leur souhaite.

Manuel Arn de Bienne a deux fils. Lorsque leur père est confronté au diagnostic de SLA, ils sont encore enfants et ne sont guère capables de comprendre que leur papa est atteint d’une maladie neuromusculaire incurable qui réduit l’espérance de vie de la plupart des personnes touchées à quelques années seulement.

Néanmoins heureux Cela date de 2014 et aujourd’hui, onze ans plus tard, Valentin et Matthias sont devenus des jeunes hommes qui ont toujours leur père à leurs côtés. Malgré les effets invalidants de sa maladie, ils voient en lui avant tout une personne dégageant la joie de vivre, empathique et habité d’une volonté de vivre incroyable : « À part mon papa, je ne connais personne qui traverse la vie en étant si heureux », commente par exemple Matthias, le cadet des deux frères. À la demande de caractériser son père en trois mots, son frère aîné Valentin répond : « volonté de vivre, serviable et empathique ».

Stratégie et intuition Matthias constate que son père gagne régulièrement au jeu de table stratégique « Puissance 4 ». Un jeu où une seule erreur peut immédiatement décider de l’issue d’une partie. De même au jeu d’échecs qui, outre une approche stratégique, exige de l’intuition et le sens de l’anticipation, son père est un adversaire coriace. Pratiquer de tels jeux demeure possible, contrairement à d’autres activités qui ne sont plus guère envisageables, comme l’explique Valentin : « Partir en vacances ensemble est devenu compliqué, car ils auraient besoin d’un hôtel adapté à ses besoins, c’est-à-dire sans barrières ».

Apprendre à prendre plaisir à la vie Alors que Valentin, l’aîné de la fratrie, suit une formation de charpentier et a déjà accompli trois années d’apprentissage sur quatre, Matthias a terminé sa première année d’apprentissage de spécialiste en restauration. Les deux sont sportifs – Valentin pratiquant l’unihockey et Matthias la moto – et entretiennent leurs relations au sein de leur cercle d’amis respectif. Après leurs formations professionnelles, les deux jeunes hommes effectueront leur école de recrues, suivie d’un voyage en Australie avec la famille recomposée : « Ils doivent apprendre à prendre plaisir à la vie », explique leur père.

Manière de gérer améliorée au fil des ans Vivre aux côtés d’un père ayant une maladie incurable lui a enseigné quelque chose d’important, souligne Valentin : « J’ai appris à apprécier le temps que nous passons ensemble ». Et à ne pas se plaindre de banalités qui le contrarient à un moment donné. Ils font souvent la popote et vont parfois manger au resto. Son frère cadet se souvient de l’époque où il avait six ans qui coïncidait avec le moment où son père a été diagnostiqué de la SLA : « Je ne savais pas ce que cela voulait dire pour moi. Ma manière de gérer cette situation s’est améliorée au fil des ans mais au début, c’était difficile. » S’il devait donner un conseil à d’autres enfants de personnes atteintes de SLA pour faire face à leur quotidien, il leur dirait d’accepter qu’il y a dans la vie de chacun des choses qu’on ne peut pas changer et dont il faut par conséquent tirer le meilleur ; et qu’on doit parcourir le monde avec le sourire, à l’image de son père qui, malgré sa maladie, voit toujours le positif.

SLA Suisse Créée en 2007, l’organisation soutient les personnes atteintes de sclérose latérale amyotrophique (SLA) et leurs proches en mettant à leur disposition une offre de prestations étendue au gré des besoins :

  • Remise en prêt de moyens auxiliaires
  • Consultation sociale, accompagnement psychologique et conseil sur la situation d’habitation
  • Aide directe lors de difficultés financières aiguës
  • Rencontres d’entraide et d’échange en présentiel et en ligne
  • Mise en réseau et formation de professionnel·le·s
  • Semaine de vacances annuelle et excursions d’un jour réservées aux personnes directement touchées et à leurs proches ou accompagnateurs·trices

Sclérose latérale amyotrophique (SLA) La maladie incurable qui affecte le système nerveux central et périphérique provoque dans les mois et années qui suivent le diagnostic des paralysies progressives de toutes les parties du corps, limitant généralement l’espérance de vie restante dans une mesure très importante et se répercutant dans de nombreux cas sur les capacités cognitives. En Suisse, environ 600 personnes sont atteintes de SLA, un chiffre qui avoisine les 400’000 à l’échelle mondiale. La maladie se déclare le plus souvent dans le midi de la vie, un peu plus souvent chez les hommes que chez les femmes.

« Je suis ses mains »

Heidi Müller soigne son mari Roland depuis qu’il a été diagnostiqué de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) il y a trois ans. « Je suis ses mains », image-t-elle. Comme on le sait, cette maladie neurodégénérative incurable entraîne paralysies de toutes les parties du corps ; par conséquent, Roland Müller ne peut par exemple plus guère utiliser ses mains. C’est une activité à plein temps que Heidi exerce pour prodiguer les soins quotidiens à son mari : « Il faut toujours avoir un pas d’avance par rapport à l’évolution de la maladie », explique-t-elle. C’est ainsi qu’un monte-rampe d’escalier doit être commandé puis installé avant qu’il ne devienne indispensable.

Soutien depuis bientôt vingt ans
« Actuellement, la vie me passe à côté », constate Heidi Müller. Rien d’étonnant à cela si l’on considère que les proches de personnes atteintes de SLA n’ont guère de moments de répit pour venir à bout de tout ce que la maladie leur occasionne. Une fois confrontées au diagnostic, les personnes touchées n’ont dans la plupart des cas qu’une espérance de vie restante très limitée. Et la maladie détermine ce qui est encore possible, tandis qu’elle progresse et prend une place de plus en plus importante dans le quotidien de la personne qui en est atteinte. Affirmer que la vie change du tout au tout après un diagnostic ce SLA n’est pas exagéré. Des possibilités existent néanmoins pour maintenir une certaine qualité de vie. Depuis bientôt vingt ans, SLA Suisse apporte un soutien individuel à toutes les personnes souffrant de la SLA et à leurs proches. Chez Heidi et Roland Müller par exemple, cette assistance personnalisée a eu lieu sous la forme d’une visite à domicile pour établir un plan d’urgence et définir l’intervention des services d’aide et de soins à domicile (ASD). Notre organisation peut à chaque fois mettre à profit son expérience au contact de nombreuses autres personnes concernées et ainsi anticiper les besoins futurs. Ces connaissances de la pratique lui permettent de montrer des possibilités pour faire face à une maladie qui, souvent, devient subitement encore davantage invalidante pour la personne touchée et plus accaparante pour ses proches. Les moyens auxiliaires simplifiant le quotidien font également partie de l’offre de SLA Suisse. Dans le cas de Heidi et Roland Müller, c’est à présent un élévateur pour patients qui facilite les soins chez eux.

Réalisé récemment : un podcast consacré à la vie avec la SLA
Partir en voyage malgré les restrictions imposées par la SLA – un tel objectif ne fait pas partie des préoccupations prioritaires du couple Müller – lui a déjà été rendu possible deux fois grâce à la semaine de vacances proposée par SLA Suisse. Celle-ci se déroule chaque année au Tessin et permet à des personnes atteintes de SLA et à leurs proches ou accompagnateur·trice·s de séjourner à la Residenza Tertianum Al Lido, qui est équipée d’appartements accessibles aux personnes à mobilité réduite. Les hôtes y peuvent louer des moyens auxiliaires et, au besoin, bénéficier d’une garde de nuit de même que d’une aide au réveil et au coucher assurée par les services ASD. Durant la semaine de vacances de SLA Suisse, les participant·e·s ont l’occasion de sortir de leur routine quotidienne et de se distraire. Dans le podcast « SLA. Vivre dans le présent », Heidi Müller parle de ses désirs et espoirs de même que  de son vécu de proche soignant et souligne également l’importance de ne pas s’abandonner soi-même.

Podcast « SLA. Vivre dans le présent » (6 épisodes)
4e épisode : Proches soignants

EN SOUVENIR DE REGULA WIPF-LANDOLT

Elle a développé des instruments techniques pour l’industrie textile et travaillé en Allemagne, Angleterre, Italie et aux États-Unis. Peu de temps après son départ à la retraite, Regula Wipf est diagnostiquée de la maladie incurable SLA.

Depuis, il y a une vie d’avant le diagnostic et une vie post-diagnostic, disait-elle dans notre rapport annuel 2022. Nous lui avions rendu visite chez elle, avions fait la connaissance de sa famille et l’avions accompagnée en nous rendant ensemble dans un environnement où elle se sentait à chaque fois heureuse en dépit de sa lutte incessante contre la maladie : l’écurie. Là où Regula Wipf retrouvait deux fois par semaine, avec son mari et sa fille, son cheval Novato, qui signifie débutant en espagnol. « Quand je suis en selle, je me sens libre », aimait-elle décrire ces moments, transportée de joie.

Il y a une bonne semaine, Regula Wipf s’est éteinte à l’âge de 70 ans. Nous adressons à sa famille nos sincères condoléances et toute notre sympathie et lui souhaitons beaucoup de force dans cette douloureuse épreuve. Que nous puissions également puiser du réconfort dans les moments vécus avec la défunte. Nous garderons d’elle le souvenir d’une femme extrêmement déterminée qui réussissait à exprimer comme devise de vie « Aujourd’hui il y a un maintenant. »

Regula Wipf-Landolt, 1er août 1955 au 6 août 2025